En Guinée, le bouleversement du programme initial du mégaprojet Simandou, notamment les conventions (Ndlr : initialement ratifiées par l’Assemblée Nationale dissoute) concernant l’exploitation du gisement de fer et de l’aménagement des infrastructures, n’aura finalement causé qu’un retard évitable dont les raisons auraient pu tout à fait être négociées parallèlement, en laissant poursuivre les travaux, laissent entendre certaines sources proches du dossier.
La décision de la junte militaire au pouvoir a certes permis à l’État guinéen d’obtenir 15% de la Compagnie du Transguinéen (CTG), une société d’infrastructures. Cependant, l’amortissement du montant élevé des investissements nécessaires à la construction du chemin de fer et du port en eaux profondes de Moribayah, soit au minimum 15 milliards de dollars USD, laisse très peu d’espoir de voir des dividendes entrer dans les caisses de l’État guinéen de sitôt.
Pour l’heure, l’essentiel de la stratégie à court terme de la junte tourne autour des taxes liées à l’exploitation de l’immense mine de fer que certaines sources estiment à plus d’1,2 milliard USD par an, après le début des exportations.
« Le temps est le meilleur juge. Tout le monde a compris maintenant qu’il faut laisser les gens travailler et construire les infrastructures », a déclaré à WESTAF MINING un haut responsable de l’administration minière.
Selon cette source, la plupart des tunnels creusés dans les montagnes séparant la zone de Kérouané et Beyla, en fait les ouvrages les plus difficiles à réaliser dans ce genre de projet complexe, entamés par WCS, sont en très bonne voie d’achèvement et la construction du port de Moribayah (Ndlr : dans la localité de Forécariah à environ 100 km de Conakry) continue d’évoluer, laissant espérer une exploitation à l’horizon fin 2025.
Ce qui semble acquis, c’est qu’avec l’activation de la carte Baowu Steel, le géant chinois de l’acier qui a pris des parts dans le capital de Winning Consortium Simandou (WCS), Simandou a pris un élan décisif après tous ces mois d’incertitudes, ponctués par les longues négociations qui ont suivi l’arrêt des travaux en Mars puis en Juillet 2022.
Baowu a payé 475 millions USD pour obtenir ses parts dans WCS et il est prévu que Rio Tinto/Simfer paie à son tour 1 milliard USD pour respecter le principe du co-développement des infrastructures.
« La seconde étape est la plus délicate étant donné que les deux compagnies installées sur le gisement n’ont pas, à priori, les mêmes intérêts stratégiques : les entreprises chinoises veulent sécuriser leurs approvisionnements en fer, via le Simandou, et Rio Tinto trouve un intérêt certain dans la vente à la même Chine de sa production de fer tirée dans ses autres mines éparpillées à travers le monde. Bien malin celui qui pourra vous dire comment ce co-développement pourra se matérialiser concrètement », a déclaré un expert à WESTAF MINING.
Toutefois, souligne cet expert, la présence de Baowu dans les deux entreprises installées sur les 4 blocs du Simandou, permet de « voir l’avenir avec optimisme », même si la vigilance s’impose pour tous les acteurs. On attend la suite…
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NB : Le gisement de fer du Simandou comprend 4 blocs : les blocs 1 et 2 ou Simandou Nord, situés vers Kérouané (au Sud Est, à environ 650 km de la capitale Conakry) sont sous le contrôle de WCS. Les blocs 3 et 4 ou Simandou Sud, situés à Beyla (à l’extrême Sud-Est, à environ 840 km de Conakry) sont une concession de Rio Tinto/Simfer. Simfer est la société de droit guinéen contrôlée en majorité par le géant anglo-australien. Le Simandou est le gisement l’un des gisements les plus riches (environ 67% de teneur en fer) à ciel ouvert, connu à ce jour. La qualité de son minerai permet de fabriquer du « Green Steal » (acier vert), eu égard aux quantités d’énergie beaucoup moins importantes nécessaires pour les aciéries.
Source : Westafmining
Last modified: 16 juillet 2024