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Satire à vue. B+, une note qui peut sonner faux dans le brouhaha de l’autosatisfaction (Par Top Sylla)

19 septembre 2025

L’agence Standard & Poor’s vient d’attribuer à la Guinée sa première notation financière : un B+ avec perspective stable. Dès lors, les communiqués triomphants ont fleuri, célébrant cette « reconnaissance internationale » et ce « nouveau départ ». Avant de céder à cette autocongratulation générale, il serait sage de gratter le vernis et de voir ce qui se cache vraiment derrière cette note.
Car oui, un B+, c’est mieux que rien. Mais c’est avant tout une note spéculative, qui place la Guinée loin des pays véritablement solvables. Traduction ? On vous accorde une certaine confiance, mais avec d’énormes réserves. Les investisseurs internationaux ne s’y tromperont pas, cette note reste associée à un risque élevé.

Le cœur de l’argument de S&P — et du gouvernement — repose sur un pari : Simandou. Ce projet pharaonique est présenté comme le Graal capable de transformer la Guinée en géant mondial du fer. Mais mettre tous ses œufs dans le même panier minier, n’est-ce pas reproduire les erreurs du passé ? Une économie diversifiée, résiliente et créatrice d’emplois durables ne se construit pas uniquement sur des mines, aussi riches soient-elles. L’histoire économique africaine est jonchée de projets miniers mirobolants aux retombées sociales décevantes. Rien ne garantit que Simandou bénéficiera réellement aux Guinéens, ni qu’il ne creusera pas davantage les inégalités.

On nous vante une rigueur budgétaire exemplaire et une inflation maîtrisée. Certes. Mais qui croit que cette discipline tiendra face à l’ampleur des besoins sociaux ? Les routes défoncées, les écoles surchargées, les hôpitaux sous-équipés réclameront tôt ou tard des investissements colossaux. La tentation de relâcher les efforts fiscaux sera forte, risquant de faire voler en éclats cette belle architecture financière.

Le rebasage du PIB, s’il donne l’illusion d’une économie subitement plus grande, ne change rien à la réalité du quotidien des ménages. Un PIB en hausse de 50% sur le papier est un coup de com’ statistique qui n’améliore pas, par magie, le pouvoir d’achat des pauvres Guinéens.
S&P elle-même le souligne en filigrane. La dépendance aux matières premières, la faiblesse des institutions et les risques politiques restent des menaces sérieuses. La notation B+ n’est donc pas un certificat de bonne santé économique, mais une ligne de crédit conditionnelle.

Faut-il pour autant jeter le bébé avec l’eau du bain ? Non. Cette notation est une opportunité. Mais elle ne vaut que si elle s’accompagne d’une lucidité absolue et de réformes en profondeur : diversification économique, lutte contre la corruption, investissement massif dans le capital humain.
Pour tout dire, le B+ de la Guinée est une étape nécessaire, mais insuffisante.

Le vrai travail commence maintenant. Alors, de grâce, cessons de célébrer une note qui reste, à l’échelle mondiale, celle d’un pays très fragile, et concentrons-nous sur l’essentiel : construire une économie bénéfique à tous, et non pas uniquement aux chiffres et aux investisseurs.

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Last modified: 19 septembre 2025

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